Vie animale embryonnaire intra utérine et sociabilité.
Sans aller aussi loin, force est cependant de constater que les animaux vivipares et ovovivipares, dont l'embryon se développent dans le corps de la femelle, ou du mâle, comme par exemple chez l'hippocampe, possèdent des comportements sociaux particulier, peut-être déjà préparés par cette présence de l'autre dans leurs premiers développements embryonnaires. Peut-être, à défaut de dieu, croient-ils ainsi en l’autre?! Bien entendu, le fait que les œufs soient ainsi mieux protégés est central dans cette évolution, mais n’est peut-être pas le seul avantage…
Cette hypothèse mérite d'être explorée plus avant d'être affirmée, mais semble intéresser les ichtyologues. Ainsi, le petit cheval marin dont nous venons de parler forme-t-il des couples fidèles tout au long de sa courte existence de 5 ans ! De même, le grand requin blanc, lui aussi ovovivipare, présente-t-il des comportements sociaux, qui, s'ils sont rares, existent bel et bien71, ainsi que chez les autres espèces?! Ce domaine de la sociabilité des requins commence tout juste à être étudié, mais d’or et déjà il semble que les requins-citrons, par exemple, développent des affinités «?amicales?» sélectives en fonctions de leurs caractères respectifs?!
Des études sont sans doute à suivre pour différencier ici ce qui tient à l’instinct ou à la présence d’un lien mémoriel avec le parent contenant les œufs. Aussi, cette nouveauté évolutive qu’a été le développement de l’embryon dans ou contre le corps de la femelle ou du mâle fait-elle peut-être partie de ce grand saut qu’à été la socialisation du vivant. A ce titre, est-ce à ce moment que l’imaginaire s’est constitué, se différenciant de la mémoire. Ce nouvel outil de l’appareil psychique est alors fondamentalement fait d’altérité, axé sur la question de la mémoire d’une présence originaire, embryologique, dans le monde du vivant vivipare et ovovivipare.
Ainsi, en exemple inverse, chez les tortues Luth, qui pondent leurs œufs dans le sable, et dont les embryons se développent seuls?:72
«?La vie sociale des tortues luth est très restreinte. Les individus de cette espèce sont plutôt solitaires car les femelles et mâles ne se rencontreraient que lors de la période de reproduction.
Les femelles peuvent se croiser sur les plages lors des pontes mais ne cherchent pas à établir de contact entre elles.?»
Aussi, pour ces animaux, et les tortues en général73, qui sont ovipares, les rencontres ne seraient basées que sur le fonctionnement instinctuel, mais très faiblement voire pas du tout sur une base altruiste, donc sociale, dont je suppose qu’elle représente l’origine de l’imaginaire.
À l’inverse, les serpents sont généralement ovovivipares, et présentent effectivement des comportements sociaux74?! Ainsi les crotales prennent-ils soin de leurs petits75?!
Autre exemple, chez un animal beaucoup plus rudimentaire?: le perce-oreille. C’est un insecte dont la femelle protège les œufs, et aussi pendant un certain temps, mais de façon inconstante, les petits une fois éclos. De fait, on observe des comportements sociaux, des chasses communes en particulier, ce qui a fait que les entomologistes ont étudié à son propos la naissance de la famille dans le monde du vivant. De plus, les femelles élèvent parfois leurs œufs ensemble?: 76
«?Chez d'autres espèces, comme Anechura bipunctata qui vit dans les montagnes européennes, ce comportement a évolué vers une atténuation de l'isolement individuel, et les femelles peuvent rassembler leurs pontes et les soigner en commun si l'occasion se présente, même si apparemment, elles ne recherchent pas activement la communauté. Il semble donc que nous soyons là devant un premier pas vers une vie en société. 77
Emergeant généralement au début du printemps, les adultes forment des groupes mixtes (mâles et femelles) atteignant plusieurs centaines d’individus. Les perce-oreilles étant nocturnes, ces groupes se forment principalement du lever jusqu’à la tombée du jour et offrent à leurs membres un large choix de partenaires sexuels.
….
Car des formes de coopération existent au sein des fratries et apportent leur lot de bénéfices pour les juvéniles. En particulier, les juvéniles du Perce-oreille commun sont capable d’aller chercher de la nourriture rapidement après l’éclosion des œufs puis d’échanger cette nourriture les uns avec les autres pendant la vie de famille (Falk et al., 2014).?»
A contrario, cet insecte bien connu appelé «?gendarme?» pourrait apparaître comme un contre exemple, puisqu’on les voit souvent en groupe, alors que la ponte se fait en extérieur, les embryons se développant dès lors sans contact avec leurs géniteurs. En fait non, puisque ces rassemblements sont surdéterminés par des phéromones particulières, et un goût commun pour certains habitats très précis, et ne montrent en réalité aucune organisation sociale interactive, au contraire des perce-oreilles.
Quant aux insectes sociaux, si bien sûr l’instinct est dominant dans leurs structures collectives, les œufs se développent au sein de soins très attentifs. La nature ne faisant rien sans raison évolutive, et compte tenu de l’énergie que demande l’entretien des couvées, il est probable que là encore cette modalité évolutive ait quelque lien avec l’acquisition de la sociabilité, peut-être pas complètement, de ce fait, du côté instinctuel. De fait, on a récemment observé une transmission culturelle chez certains bourdons, capables d’échanger et d’apprendre de façon cumulative les uns avec les autres, au-delà de l’instinct.78
Mais laissons ces questions, peu explorées, aux spécialistes de zoologie, auxquels elle a été posée, suscitant un certain intérêt.
La transmission embryologique permet et favorise sans doute que s’ajoutent aux comportements sociaux instinctuels, des comportements sociaux culturels. On sait de plus en plus en éthologie animale que le concept de culture peut s’appliquer à de nombreuses espèces. On repère ainsi même des langues différentes, du moins des dialectes, chez les communautés d’orques79.
Imaginaire, transcendance, socialisation et embryologie intra-utérine.